Les enfants malnutris dans un état critique sont admis dans le centre d'alimentation thérapeutique situé à l'hôpital Adré. © Jan Bohm/MSF
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Une enquête MSF apporte un nouvel éclairage sur l’ampleur et l’intensité des violences ethniques

Le vendredi 12 janvier 2024

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Le conflit au Soudan a entraîné une crise humanitaire de grande ampleur dans l’est du Tchad où près d’un demi-million de personnes ont trouvé refuge, aux côtés de milliers d’autres réfugiés soudanais déjà présents dans le pays depuis deux décennies et de communautés locales elles-mêmes vulnérables. D’importants moyens financiers, logistiques et humains restent nécessaires pour intensifier la réponse humanitaire, notamment l’aide alimentaire d’urgence, à Adré et dans les camps alentours. 

Les équipes MSF continuent de fournir un large éventail de soins médicaux à l’hôpital et dans différentes cliniques et centres de santé (pédiatrie, santé maternelle, nutrition, chirurgie traumatologique, vaccination, santé mentale, etc.) et d’œuvrer à améliorer l’accès à l’eau et aux services d’hygiène et d’assainissement. Les cliniques MSF d'Adré accueillent environ 3 000 patients par semaine, principalement des enfants souffrant de paludisme, de diarrhée, de rhume et d'infections des voies respiratoires.

Le Directeur Général du Centre Opérationnel de MSF à Genève, Stephen Cornish, s’est rendu en décembre 2023 dans les camps pour appeler à un engagement accru et à une aide urgente. Malheureusement, parmi les autres crises, celle-ci passe souvent inaperçue.

J'ai été travailleur humanitaire dans le monde entier, mais ce que j'ai vu au Tchad, cette situation d'urgence m'a profondément choqué. (…) Abandonnés dans le désert, des femmes et des enfants, pour la plupart, ont été confrontés à des horreurs indicibles », décrit Stephen Cornish. 

« Il est temps d'unir nos efforts pour offrir un refuge sûr et des conditions de vie dignes. »

 

Vue du camp de réfugiés à Ourang, Tchad © Renaud Masbeye - MSF
« Un demi-million de réfugiés soudanais dans l'est du Tchad dépendent de l'aide humanitaire »
Déclaration de Stephen Cornish, directeur général de MSF Suisse, qui s'est rendu dans les camps de l'est du Tchad.

Un nouvel éclairage sur les violences ethniques au Darfour occidental

Une enquête de mortalité menée auprès de réfugiés soudanais au Tchad par Epicentre, satellite de MSF dédié à l’épidémiologie et la recherche médicale, documente l’ampleur effarante de la vague de violences qui a déferlé sur la région en juin dernier, alors que les atrocités se sont poursuivies ces derniers mois dans la région d’El Geneina, capitale du Darfour occidental.

Si les résultats indiquent, dans les trois camps de réfugiés où s’est déroulée l’enquête, une surmortalité importante à partir du début du conflit au Soudan en avril 2023, ce sont les réfugiés abrités dans le camp d’Ourang, qui viennent principalement d’El Geneina, qui ont été les plus durement affectés. Le taux de mortalité est multiplié par vingt à partir d’avril pour atteindre 2,25 morts pour 10 000 personnes par jour, avec un pic en juin. Quatre-vingt-trois pour cent des personnes décédées sont des hommes, la violence - notamment par armes à feu - étant la cause de la mort dans 82% des cas. La majorité des décès a eu lieu à El Geneina tandis qu’un quart sont survenus lors de la fuite vers le Tchad. Près d’un homme sur vingt parmi ceux âgés de 15 à 44 ans a été porté disparu sur cette période. 

Une femme blessée par balle au cou, prise en charge à l'hôpital d'Abéché.©  Mohammad Ghannam/MSF

Ces résultats corroborent les témoignages de patients parmi les quelques 1 500 blessés soudanais pris en charge par nos équipes en collaboration avec les autorités sanitaires tchadiennes dans l’unité chirurgicale de l’hôpital d’Adré depuis juin dernier. L’afflux de blessés le plus important que nous ayons vécu à Adré, avec 858 blessés de guerre reçus entre le 15 et le 17 juin, correspond au pic de mortalité observé dans l’enquête", explique Claire Nicolet, responsable des programmes d’urgence au Tchad. 

 

De nombreux blessés rapportaient alors que des miliciens arabes les visaient en raison de leur appartenance ethnique Masalit et leur tiraient dessus à El Geneina. Ils nous expliquaient que ces violences se poursuivaient ensuite dans les villages et checkpoints qui jalonnaient la route vers le Tchad, ciblant systématiquement les hommes de la communauté Masalit ».

Les récits des réfugiés qui ont fui le Darfour occidental ces six derniers mois dressent le tableau d’une spirale de violences insoutenable, faite de pillages, d’habitations incendiées, de passages à tabac, de violences sexuelles et de massacres. 

Les miliciens nous ont dit que ce n'était pas notre pays et nous ont donné deux options : partir immédiatement au Tchad ou être tués ici. Ils ont pris quelques hommes et je les ai vus les abattre dans les rues, sans personne pour enterrer les cadavres » explique ainsi H., une personne d’une vingtaine d’années réfugiée à Adré après avoir fui El Geneina. 

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