Une partie d'un lot de projectiles de différents calibres que les médecins de MSF ont retiré des blessures de certains patients de MSF au Centre d'urgence de Turgeau.©Johnson Sabin
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Une nouvelle enquête révèle des niveaux extrêmes de violence à Port-au-Prince

Le jeudi 7 mars 2024

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Rapport- Estimation rétrospective de la mortalité brute et du niveau de violence subie par la population de Cité Soleil, Port-au-Prince, Haïti, entre juillet 2022 et aout 2023.
Une partie d'un lot de projectiles de différents calibres que les médecins de MSF ont retiré des blessures de certains patients de MSF au Centre d'urgence de Turgeau.©Johnson Sabin

En Haïti, la première enquête portant sur l’impact de la violence sur la mortalité depuis plus de dix ans révèle des niveaux de violence extrême subis par les résidents du bidonville de Cité Soleil à Port-au-Prince.

Par le passé, MSF a pu observer des taux de mortalité similaires en 2017 dans les camps de Raqqa en Syrie auprès d’une population ayant été exposée aux bombardements de la coalition internationale contre le groupe État Islamique et au régime de terreur de ce dernier, ou encore parmi les réfugiés Rohingya dans les camps de Cox’s Bazar, pendant les mois immédiatement précédant la campagne de violence lancée à leur encontre par l’armée birmane.  Au-delà des taux de mortalité élevés, 13% des habitants de Cité Soleil interrogés ont rapporté avoir été témoins d'actes de violence extrême tels que des meurtres ou des lynchages en pleine rue. 40 % des femmes interrogées ont également indiqué avoir renoncé à des soins prénataux à cause de l’insécurité.

This patient, a victim of head trauma, was taken to the MSF emergency center in Turgeau. After being stabilized, he was referred to another health facility because his case (his medical needs) did not meet our admission criteria. Port-au-Prince, Haiti, Monday, June 21, 2022. ©MSF/Johnson Sabin

J'ai l'habitude de voir qu'on tue des gens. J'ai l'habitude de voir des corps par terre. J'ai l'habitude de voir des cadavres brûlés. J'ai l'habitude d'entendre des détonations. Des fois, c'est quelqu'un que tu connais. Quand je parle de terreur, je parle de la violence armée. Je parle de la violence physique. Je parle de la violence psychologique. Je parle de la misère. Je parle de tueries. Je parle de violences des gangs sur les populations », dit un membre du personnel haïtien d’MSF.

L’enquête brosse le portrait d’une vie quotidienne en proie au chaos, où les habitants de la capitale haïtienne sont confrontés constamment à la menace des gangs, et aux affrontements entre ces groupes armés, la police et des brigades civiles d'autodéfense.

Selon le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, le mois de janvier 2024 a été le plus violent depuis plus de deux ans, avec au moins 806 personnes tuées, blessées ou kidnappées dans le pays. La situation s’est détériorée par la suite et depuis le 28 février Port-au-Prince est en proie au chaos, avec des dizaines de blessés reçus par les structures médicales d’MSF.

Quand on est père de famille et qu'on regarde une fillette de deux ans qui arrive et qui est blessée par balle, c'est vraiment choquant. Quand on regarde aussi des écoliers qui passent et qui n'ont rien à voir avec les groupes armés, qui se font tirer dessus et qui ont des balles dans le corps, c'est vraiment choquant » témoigne un autre membre du personnel MSF travaillant dans le pays.

Ces statistiques alarmantes soulignent la sombre réalité dans laquelle la population haïtienne tente de survivre, avec un nombre d’homicides ayant doublé entre 2022 et 2023. Les enlèvements ont également augmenté de 83% sur la même période, selon le rapport du Secrétaire Général de l’ONU. 

L'ampleur réelle de la violence pourrait être bien plus importante, comme le montrent les résultats de l’enquête, qui dépassent de loin les chiffres officiels : 

en 2023, plus de 4 700 victimes d’homicides ont été recensées dans le pays, alors que le nombre de morts violentes dénombrées dans le cadre de l’enquête d’Epicentre dépasse les 2 300 pour Cité Soleil uniquement, dont la population ne représente que 9% de celle de la capitale haïtienne. 

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