Aujourd’hui, les équipes MSF continuent à se déployer pour prendre en charge les blessés et les personnes touchées par le choléra ou d’autres problèmes médicaux dans le Sud et le Nord-Ouest d’Haïti. Laura Bianchi, de retour de mission en Haïti, rappelle que la crise est loin d’être finie.
Les villages éloignés des régions les plus touchées par l’ouragan (dans les départements de Nippes, Grand’Anse et Sud) qui a frappé Haïti le 4 octobre dernier continuent de faire face à des lacunes importantes. Ce qui ne peut que conduire à une détérioration de la santé des populations affectées.
Ce qui domine en moi, c’est la tristesse. Celle de voir des personnes désespérées, un mois après le passage de l’ouragan, parce qu’elles ne savent toujours pas comment elles vont pouvoir nourrir leur famille ou reconstruire leur foyer, explique Laura Bianchi.
Un mois après le passage de l’ouragan, l’inquiétude est très présente au sein des équipes MSF. Une nouvelle détérioration de l'état de santé des populations ne peut que surcharger les systèmes de santé locaux qui n’étaient déjà pas en mesure de prendre en charge tous les besoins des populations avant l’ouragan.
Les besoins urgents des populations dans les zones touchées sont : le manque de nourriture, car les cultures et les stocks ont été détruits et le cheptel décimé, ce qui prive ces communautés de leurs moyens de subsistance ; ensuite, compte tenu de la destruction massive des maisons, il faut acheminer dans des endroits, rendus difficilement accessibles par la dégradation des routes et des chemins, des abris protecteurs et du matériel de construction ; il faut aussi déployer des soins médicaux de base pour prendre en charge les nombreux blessés et malades et restaurer la distribution d'eau potable. Si ces besoins urgents ne sont pas couverts, cela signifie qu'il y a aura d’avantage de besoins en soins médicaux qualifiés.
Au cours de nos consultations, nous voyons déjà une augmentation des infections respiratoires, mais nous nous attendons à une augmentation des maladies cutanées et liées à la mauvaise qualité de l’eau, ainsi qu’à une dégradation de l'état nutritionnel des enfants, continue Laura.
«Il y a quelques jours, j'ai traité une femme âgée qui avait de graves brûlures sur sa main. Comme elle a refusé que je lui injecte un médicament contre la douleur, j'ai tenté de la distraire en lui parlant de sa famille. Elle avait perdu ses deux enfants et était maintenant seule à subvenir aux besoins de ses deux petits-enfants. Sa seule inquiétude pendant que je la traitais était qu'en quittant la clinique, elle devait faire face à la réalité de devoir retourner à la maison sans rien pour nourrir ses petits-enfants», confirme le Dr Danielle Perreault.
L’autre grosse inquiétude réside dans les risques de propagation d’une épidémie de choléra. L'ouragan a gravement endommagé les systèmes d'approvisionnement en eau, les installations sanitaires et l'accès aux centres de traitement du choléra. Pour réduire ces risques, une approche globale est nécessaire, comprenant un accès à l’eau potable, l’amélioration de l'assainissement, le renforcement de la surveillance des cas de choléra, l'accès à un traitement adéquat pour les personnes infectées et la mise en place d’une capacité d'intervention rapide. «MSF a distribué plus d'un million de tablettes de chlore dans les départements Sud, Grand’Anse et Nippes, car cela fournit immédiatement de l'eau potable. Mais cela ne peut être qu'une solution temporaire. Rétablir les réseaux d’alimentation en eau doit être une priorité pour aider à réduire les infections liées à la mauvaise qualité de l’eau. Car sans accès à l’eau potable de manière continue, la population utilise forcément de l’eau potentiellement contaminée», raconte Laura.
Au cours d’une intervention d’urgence, les besoins médicaux des populations peuvent évoluer rapidement et la réponse médicale doit s’adapter en conséquence. Quand, dix jours après l’ouragan, Laura Bianchi arrive dans la ville de Jérémie, située dans l’une des régions les plus touchées, ce sont les fractures, les blessures ouvertes ou infectées et les urgences pédiatriques qu’il faut traiter: «Lorsque les plaies profondes ou les fractures ouvertes ne sont pas traitées à temps, elles peuvent s’infecter rapidement. Si rien n’est fait, l’infection peut s’aggraver et entraîner un risque de septicémie (infection généralisée du sang), ce qui engage le pronostic vital de la personne. D’où l’importance d’aller dans les zones difficiles d’accès en multipliant les cliniques mobiles pour prendre en charge les patients vivant dans des zones reculées», expose Laura.
L’accès aux populations dans les villages reculés reste un défi immense. Alors que les routes du littoral sont aujourd’hui en cours de réhabilitation, la majorité des populations vivant dans les vallées et les montagnes sont toujours coupées de toute aide et vivent dans des conditions très difficiles, très loin des standards minimums. «Nous avons recours à tous les moyens possibles pour atteindre les villages reculés : des hélicoptères, des voitures, des motos, nous avons même loué des ânes pour acheminer du matériel vers ces villages. Notre priorité est de réussir à soigner les personnes vulnérables. Mais il reste bien évidemment des zones que nous n’avons pas encore pu atteindre», poursuit Laura.
«J’ai beaucoup de mal à penser à la détresse des personnes qui vivent dans les villages que nous n’avons pas encore réussi à atteindre. Je pense en particulier aux personnes âgées, vulnérables et affaiblies, mais aussi aux enfants qui risquent de souffrir de malnutrition et à toutes les personnes laissées sans soins depuis plusieurs semaines. Les personnes affectées par le passage de l’ouragan Matthew souffrent et ont besoin d’assistance. La crise est loin d’être terminée», conclut Laura Bianchi après sa mission.
Appel aux dons
Ne laissons pas tomber ceux qui ont tout perdu à cause de l'ouragan Matthew. MSF lance un appel aux dons pour éviter que cette catastrophe naturelle ne se transforme en crise sanitaire.
90 euros suffisent pour fournir de l'eau potable à plus de 1 880 personnes pendant 7 jours et prévenir le risque d'une épidémie de choléra !
Soutenez l'action de nos équipes sur le terrain : faites un don ici ou par virement avec la communication "Urgence Haïti" sur le compte CCP LU75 1111 0000 4848 0000.
Outre son intervention d’urgence, MSF gère de multiples projets dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince : l’unité des grands brûlés de l’hôpital Drouillard, le centre d’urgence Martissant, l’hôpital chirurgical d’urgence Nap Kenbe, le centre de référence des Urgences en Obstétrique (CRUO), la clinique des survivants de violences sexuelles de Pran Men’m et le centre de traitement choléra Figaro qui peut être opérationnel en quelques heures. MSF soutient également le centre Diquini pour les patients atteints de choléra.