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Guinée, Libéria, Sierra Leone

Recherche Opérationnelle : aperçu général sur Ebola

Recherche opérationnelle 

    La recherche opérationnelle a joué un rôle vital dans la lutte MSF contre l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest. Un article récemment publié s’intéresse aux principales conclusions et leçons tirées de la plus importante épidémie d’Ebola de l’histoire. 

    De 2014 à 2016, le virus Ebola s’est répandu en Guinée, en Sierra Leone et au Liberia. Au total, 28 646 personnes ont été infectées, dont 11 323 ont succombé à la maladie. Soignant 5 226 patients d’Ebola confirmés, Médecins Sans Frontières (MSF) a en même temps investi dans la recherche sur la propagation du virus, sur l’efficacité des traitements possibles et sur les conséquences pour les systèmes de santé locaux.

    Dans leur article intitulé Operational Research during the Ebola Emergency (« La recherche opérationnelle durant la crise Ebola »), des membres de l’unité de Recherche opérationnelle de MSF à Luxembourg et à Bruxelles ont rassemblé les principales conclusions et idées sur le sujet.

    Les six piliers de la lutte contre Ebola

    La lutte contre l’épidémie d’Ebola a nécessité un ensemble complexe et bien coordonné de mesures. En collaboration étroite avec ses partenaires, MSF a suivi une approche bien établie : les patients d’Ebola confirmés ont d’abord dû être isolés et soignés dans des centres spécialisés de traitement d’Ebola. Quiconque ayant été en contact avec des patients auparavant devait être immédiatement retracé. Dans les communautés touchées, la sensibilisation à cette maladie et aux risques d’infection était importante. La mise en place d’un système de surveillance et d’alerte a par la suite aidé à lutter contre les infections dans les communautés et les centres de traitement. Enfin, les soins de santé réguliers pour les patients souffrant de maladies autres qu’Ebola ont dû être maintenus.

    À travers ces six piliers de la lutte contre Ebola, les questions de recherche opérationnelle ont permis une amélioration des interventions de MSF durant l’épidémie. Les conclusions apportent à présent un point de vue unique sur la manière dont les acteurs humanitaires peuvent mieux lutter contre de futures épidémies.

    Importance de la charge virale, tests sanguins alternatifs et médicaments à l’étude

    En vue d’une évaluation précoce des cas suspects d’Ebola, des symptômes cliniques comme la fièvre, les douleurs musculaires ou la diarrhée ont aidé médecins et personnel de santé à évaluer et à identifier rapidement les patients infectés. Les études laissent à penser que la charge virale, c’est-à-dire la quantité de virus présente dans le sang d’un patient, aide alors à prédire de manière fiable ses chances de survie et à adapter les soins en conséquence.

    Dans le cadre de leur travail dans les centres de traitement d’Ebola, les professionnels de la santé doivent porter une tenue de protection incommode, ce qui rend les soins et examens médicaux plus difficiles. Alors que la plupart des prélèvements sanguins se font dans une veine du bras (ponction veineuse), des données provenant de Guinée montrent que la piqûre au doigt, méthode plus pratique et moins invasive, a permis de dépister 87 % des cas d’Ebola.

    Pour les enfants en bas âge ou dans des environnements où la ponction veineuse est impossible ou jugée peu sûre, la piqûre au doigt constitue ainsi une réelle alternative pour les tests sanguins. MSF, en collaboration avec l’Institut de médecine tropicale à Anvers, a également lancé un essai clinique concernant le plasma de convalescent  – un sérum provenant de patients guéris d’Ebola – qui, toutefois, s’est révélé inefficace chez les patients nouvellement infectés. En revanche, le médicament à l’étude, le Favipiravir, s’est avéré efficace pour les patients atteints d’Ebola présentant une charge virale basse.

    Conseil aux patients et travail avec les communautés

    Survivre à Ebola peut laisser de profondes séquelles sur la santé mentale des patients. En Sierra Leone, on a découvert que parmi les malades du virus Ebola, un survivant sur cinq présentait un risque élevé de développer un trouble de stress post-traumatique; aussi a-t-on recouru à des équipes de conseil psychologique tout au long de l’épidémie.

    Dans les communautés touchées par Ebola ou faisant l’objet de mesures strictes de quarantaine, des anthropologues de MSF ont examiné les conséquences sociales de l’épidémie. Les zones de quarantaine obligatoires destinées à arrêter la propagation d’Ebola et à sauver des vies provoquaient souvent un sentiment de condamnation, voire une stigmatisation. Les messages de promotion de la santé ont été adaptés en conséquence, différents moyens de communication restant toutefois à explorer afin de lutter contre le développement d’un climat de rumeurs et de suspicion dans les communautés touchées.

    Maintien des soins de santé pendant l’épidémie d’Ebola

    La lutte contre Ebola a entraîné d’importants besoins de ressources humaines et médicales, auxquels les systèmes de santé locaux n’étaient pas en mesure de répondre. Pour cette raison, MSF, l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le Programme spécial de recherche et de formation concernant les maladies tropicales, les ministères de la Santé et d’autres organisations ont organisé deux Initiatives de formation en recherche structurée consacrées aux effets de l’épidémie d’Ebola sur les performances du système de santé.

    Comme le montrent les seize études différentes qui s’en sont suivies, l’offre de services médicaux non liés à la lutte contre Ebola a diminué considérablement durant la crise. Des effets négatifs ont été constatés au niveau de programmes essentiels de traitement du VIH/SIDA, de la tuberculose, du paludisme et de la malnutrition, au niveau des campagnes de vaccination et dans le domaine des soins maternels et infantiles.

    Dans certains cas, le personnel de santé a réussi à adapter les procédures médicales pendant l’épidémie d’Ebola. Pour respecter la «no touch policy» (politique interdisant tout contact physique) instaurée à cause d’Ebola, le personnel de santé communautaire a renoncé dans le district sierra-léonais de Kenema aux tests de diagnostic rapide du paludisme au profit d’un traitement basé sur les symptômes. Marquées par l’urgence des enjeux et les expériences du personnel sur le terrain, les conclusions tirées en matière de recherche opérationnelle ont, dans l’ensemble, contribué à améliorer les interventions d’urgence de MSF. Parallèlement à cela, une analyse plus approfondie des données collectées est en cours.

    L’article intitulé Operational Research during the Ebola Emergency («La recherche opérationnelle durant la crise Ebola») a été publié dans Emerging Infectious Diseases, les seize études consacrées aux performances du programme de santé pendant l’épidémie d’Ebola ayant, elles, été publiées dans Public Health Action en juin 2017.

    Un rapport détaillé concernant la recherche opérationnelle de MSF en matière d’Ebola est également disponible, tous les articles connexes étant publiés sur Field Research.

    * Photo principale: zone d’habillage du centre de gestion d’Ebola de Kailahun en Sierra Leone. Deux hygiénistes se préparent à entrer dans la zone à haut risque. Décembre 2014. © Anna Surinyach